AVIS
du Conseil Economique, Social, Culturel et Environnemental de Saint-Barthélemy
sur l’étude des incidences sur l’environnement jointe à la demande de permis de construire déposée pour
AUTOUR DU ROCHER
Le 14 mai 2019, le Service de l’urbanisme de la Collectivité de Saint-Barthélemy adressait au CESCE l’étude des incidences sur l’environnement du projet de construction d’une propriété sur le site AUTOUR DU ROCHER afin que les Conseillers puissent rendre un avis sur l’impact environnemental du projet.
Après avoir pris connaissance du document qui leur a été transmis et après avoir échangé et débattu selon leurs compétences respectives, les Conseillers du CESCE (à l’exception de Me P. Kirscher qui n’a pas participé à l’élaboration de cet avis afin d’éviter tout conflit d’intérêt) ont rendu l’avis suivant :
Sur certains éléments techniques contenus dans l’étude des incidences du projet sur l’environnement :
Dans un premier temps, le CESCE fait remarquer que la démarche éco-responsable du projet décrite en pages 25 et 26 est peu développée. Il souhaite également attirer l’attention de la Collectivité sur certaines imprécisions ou incohérences relevées dans le document :
- La consommation d’eau (8m3/jour) est, selon le CESCE, sous-estimée. En effet, le document indique qu’elle est déterminée sur la base de 3 villas (cf. page 21) sans tenir compte vraisemblablement des autres équipements présents sur le site (voir pages 21 et 79) tels que les piscines, le bar, le spa, la salle de sport, la zone d’accueil, espace de vie sur la plage…
- La consommation d’énergie est elle aussi mal appréciée. En effet, les 100.000 kWh estimés reviennent à établir une moyenne de consommation journalière de 274 kWh/jour ce qui correspond à la consommation d’une villa 5 chambres avec piscine. Sur ce point, le CESCE estime que les calculs devront être réévalués à la hausse. D’autant plus qu’aucune source d’énergie renouvelable n’est prévue dans le nouveau projet et qu’il est précisé en page 22 que « l’électricité proviendra du réseau local de Saint-Barthélemy ».
- En ce qui concerne la récupération de l’eau de pluie, le document indique en page 21 que « Les eaux de pluie seront récupérées sur pratiquement la totalité des toitures » et propose une liste des toitures des bâtiments visés. Or, en page 24, il est précisé qu’« une large partie des toitures sera végétalisées. ». Faut-il comprendre que des toitures et donc des bâtiments supplémentaires autres que ceux listés en pages 21 seront implantés sur le site ? Y-a-t-il confusion avec le projet initial ? Afin d’éviter toute équivoque, cette question mérite, selon le CESCE d’être éclaircie.
- Concernant l’impact du projet sur la faune notamment, le CESCE a noté avec regret que l’étude des incidences reconnait elle-même ses limites puisqu’il est écrit en page 99 notamment que « les impacts décrits ne sont pas complets » et que « les relevés ne sont pas exhaustifs ».
Dans un deuxième temps, compte tenu du fait que l’étude consacre 30 pages au milieu naturel, le CESCE suggère, si cela n’est pas déjà prévu, que l’avis de l’ATE soit sollicité pour qu’elle s’exprime sur l’impact du projet sur la faune et la flore.
Enfin, afin de s’assurer que tous les engagements pris en ce qui concerne la réalisation du projet et qui sont décrits dans l’étude d’impact soient effectivement respectés et que la conformité du projet réalisé soit sans appel, le CESCE invite en outre la Collectivité à utiliser les dispositions de l’article 133-57 du Code de l’urbanisme qui l’autorise à organiser des contrôles mensuels sur site. L’ATE, quant à elle, devrait être consultée régulièrement sur les questions d’aménagement paysager et les espèces choisies.
Sur la nature du projet, lui-même :
Dans un premier temps, le CESCE s’interroge sur l’opportunité de la réalisation d’un tel projet qui vient s’ajouter à l’offre d’hébergement touristique pléthorique.
Le CESCE, tout en admettant que ce type de projet participe à renforcer l’image du très haut de gamme que véhicule notre île, prévient aussi que cela contribue à aggraver sa densification et tout ce que cela implique. D’autant plus que la description du projet et des aménagements laisse penser, selon le CESCE, qu’il s’agit plus d’une structure hôtelière…
En cela, Il invite la Collectivité à porter une attention toute particulière à la demande de permis de construire, à la destination des bâtiments et à leurs équipements. (Bar, espace spa, espace « staff », espace d’accueil, espace vie sur la plage, cuisines équipées de matériel professionnel…)
Dans un second temps, compte tenu du contexte actuel et des modifications apportées à la carte d’urbanisme et à son règlement, le CESCE estime qu’il serait opportun que cette demande de permis de construire, sur un site qui revêt un caractère patrimonial et emblématique, serve d’exemple et de référence.
En effet, la demande intervient au moment précis où la Collectivité a affirmé des choix en faveur de la maîtrise de constructibilité et de l’habitat familial.
En ce sens, le CESCE considère que le permis de construire du projet devrait être accordé selon les récentes orientations de la Collectivité.
Dans ce contexte, la collectivité pourrait inviter le propriétaire à reconsidérer à la baisse la taille du projet. En effet, comme cela a été déjà été relevé plus haut, les projections en matière de consommation d’eau et d’électricité sont nettement sous-estimées.
Or, chacun sait que la Collectivité a, de nombreuses fois, attiré l’attention sur les problèmes primordiaux de distribution d’eau et d’énergie sur l’île. Les seuils de capacité de production des réseaux se rapprochent.
L’envergure de ce type de projet énergivore et gros consommateur en eau contribuera, sans conteste, à aggraver et accélérer la dérive de saturation des réseaux de l’île. En d’autres termes, ce projet est de nature à empêcher que d’autres projets plus modestes et destinés au logement ou à l’habitat familial ne voient le jour, dans l’avenir.
Ce projet pourrait ainsi servir d’exemple pour le futur en matière urbanistique.
En agissant ainsi, le Collectivité serait en accord avec la politique qu’elle soutient en matière de construction et donnerait le ton.
Pour aller plus loin et pour conclure, le CESCE suggère que le code de l’énergie de Saint-Barthélemy, en cours de rédaction, prévoit des règles claires et sans équivoque en matière de puissance électrique fournie par EDF pour chaque nouveau projet et dispose que toute production d’électricité supplémentaire devra obligatoirement se faire par des énergies renouvelables.
Nombre de votants : 11
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Nombre de votes négatifs : 0
Nombre d’abstentions : 3
Cet avis est adopté à la majorité