01/10/2020
AVIS
du Conseil Economique, Social, Culturel et Environnemental de Saint-Barthélemy
sur le dossier d’étude d’impact joint au projet de l’hôtel « Etoile » à Saint-Jean – Saint-Barthélemy
Le 1er septembre 2020, le CESCE recevait du Service de l’urbanisme de la Collectivité de Saint-Barthélemy la demande de permis de construire modificatif n° 9711231900052/M1 déposée par la SAS ST JEAN BEACH REAL ESTATE et les documents s’y rapportant afin que les Conseillers puissent rendre un avis sur ce projet.
Après avoir pris connaissance du dossier, les membres du CESCE ont partagé leurs réflexions selon leurs compétences respectives et ont adopté le présent avis[1].
Le CESCE a bien pris note du fait que l’étude d’impact révisée jointe à cette demande de permis de construire modificatif précise dès l’introduction que « Cette analyse fournit les informations supplémentaires demandées par le CESCE ».[2]
Dans un souci de cohérence, les conseillers ont, par conséquent, repris chacune des lacunes mentionnées dans leur avis rendu en 2019 et ils ont vérifié si ces insuffisances avaient été corrigées dans ce nouveau projet.
Il ressort de cette analyse que :
- Concernant le risque d’érosion de la plage lors des tempêtes et cyclones
Habilement, et sans doute à titre de mesure conservatoire, l’étude d’impact insiste, à juste titre, sur le constat de dégradation avancée de l’écosystème de la baie de Saint-Jean et notamment du massif corallien.
Elle reconnaît toutefois la nécessité pour l’hôtel « L’Etoile » de « soutenir la restauration des massifs coralliens pour rétablir l’écosystème ».[3]
Afin de ne pas augmenter le processus de dégradation par la construction, le projet prévoit la réalisation devant les ouvrages de talus composés d’enrochements inclinés et de tapis anti-affouillement.[4]
Ce dispositif, décrit par des coupes à différents points sensibles du projet et complété par de nombreuses notes techniques pour démontrer son efficacité, semble très léger, quand on a pu constater les dommages considérables subis par les rivages lors des derniers cyclones.
De plus, ces notices, très techniques, sont difficiles à interpréter pour des non-professionnels.
Une modélisation informatique des effets de la mer sur le littoral de la baie de Saint-Jean, comme cela a été fait par la Collectivité pour le port de Gustavia, aurait permis aux élus de mieux appréhender les risques d’érosion de la plage.
- Concernant les mesures mises en œuvre pour la stabilisation des fouilles et le renforcement du sol durant l’excavation du sous-sol
L’étude d’impact explique qu’il est prévu d’utiliser la technique de « Jet Grouting » pour la stabilisation des fouilles et le renforcement du sol durant l’excavation du sous-sol.[5] Cette technique consiste à injecter sous haute pression un coulis de ciment dans des forages verticaux. Il est prévu une ceinture périmétrique de colonnes d’une hauteur de 10 mètres de haut.
Les conclusions de l’étude précisent ainsi que « La technique du Jet Grouting permet de stabiliser le terrain et éviter sa liquéfaction. En phase de travaux, une paroi périmétrique en Jet Grouting permettra de stabiliser la fouille et ne pas décompresser les sols voisins. Le Jet Grouting est complété par une injection d’un bouchon étanche pour éviter la remontée d’eau dans la fouille lors des travaux d’excavation ».[6]
Le CESCE attire l’attention de la Collectivité sur les risques de cette technique et principalement, en ce qui concerne le traitement de l’énorme volume des rejets de coulis de ciment en surface (de 5 à 50 m3 par colonne de 10m.). Cette technique prévoit l’installation d’une zone de traitement et de stockage des rejets (Bassins, cuves etc.)
L’étude d’impact ne précise pas l’emplacement attribué à ces installations nécessitant un grand espace. Compte tenu de la surface du terrain excavée, il va sans dire que le traitement des rejets ne pourra pas être réalisé sur le terrain d’assiette du projet.
De même, le traitement des eaux de pompage avant rejet en milieu naturel nécessite un espace important qui pourra difficilement être réalisé sur le terrain de l’hôtel.
Concernant la gestion des eaux d’exhaure, il est stipulé dans les conclusions de l’étude d’impact révisée que « l’injection d’un bouchon étanche limitera la venue d’eau dans les fouilles, l’indice de perméabilité du sol K de l’ordre de 10-7. Les eaux d’exhaure sont pompées en dirigés vers des bassins de décantation, une fois décantée, ces eaux seront envoyées dans des fosses d’infiltration sur le terrain d’assiette du projet. La qualité de l'eau avant rejet et devant la parcelle sera contrôlée par un laboratoire. Les résultats seront mis à la disposition du public ».[7]
En conclusion, si quelques corrections ont été apportées par le pétitionnaire, il n’en demeure pas moins qu’il y a peu de changement. Le CESCE confirme par conséquent son avis défavorable :
Compte tenu de l’importance de l’enjeu, le CESCE maintient sa position concernant le risque d’érosion de la plage. Si les études décrivent un procédé de protection intéressant, et sans doute efficace pour des aléas courants, il émet toutes réserves sur leur efficacité lors des cyclones à venir auxquels seront confrontés inévitablement les rivages de Saint-Barthélemy.
Il encourage la Collectivité à demander un complément d’étude avec une modélisation informatique des effets de la mer, et lui suggère de s’entourer des conseils d’ingénieurs spécialisés.
Le CESCE attire également l’attention de la Collectivité sur les conséquences des techniques de pompage nécessaires à la réalisation des terrassements et lui conseille de solliciter un complément d’informations concernant le traitement des rejets de ciment et des eaux d’exhaure, notamment leur plan d’implantation.
Si le projet modificatif ne prévoit « plus que » 3 bâtiments de 1 étage en bord de plage, il n’en demeure pas moins que ces constructions porteront atteinte à la cohérence du paysage naturel et urbain de la zone.
Nombre de votants : 13
Nombre de suffrages exprimés : 9
Nombre de votes positifs : 9
Nombre de votes négatifs : 0
Cet avis est adopté à la majorité
[1] Me P. Kirscher n’a pas participé aux débats afin d’éviter tout conflit d’intérêts
[2] Page 5 de l’étude d’impact révisée
[3] Page 6 de l’étude d’impact révisée
[4] Page 7 et 249 et suivantes de l’étude d’impact révisée
[5] Pages 35 et suivantes, 448 et suivantes, 633 et suivantes
[6] Page 717 de l’étude d’impact révisée
[7] Ibid.